Le marché sud-américain fait saliver les constructeurs occidentaux depuis bien longtemps. Dès 1952, l’américain Willys-Overland s’implante au Brésil pour produire des Jeep puis, avec l’élévation du niveau de vie local, des berlines, dont l’Aero. Celle-ci, motorisée par un gourmand 6-cylindres, ne convient guère à la clientèle locale, peu argentée.
Alors, le constructeur US s’associe avec Renault, désireux, lui aussi d’investir le Brésil, qui lui fournit la Dauphine pour qu’elle soit produite localement et ainsi, échapper aux droits de douane. La petite familiale française entre en production sud-américaine dès 1959, et connaît son petit succès. L’Alpine A108 sera aussi fabriquée sur place, sous l’appellation Willys Interlagos.
Le marché entrant en expansion, Willys-Overland do Brasil a besoin d’une auto intermédiaire, à placer entre la Dauphine et l’Aero. William Max Pearce, patron de la filiale, s’adresse donc à la maison-mère, pour obtenir – difficilement – un financement pour développer une telle voiture. Les quelques millions attribués ne suffisant pas, il va voir Renault qui est alors en train de développer la 12. Celle-ci, moderne mais simple techniquement et du bon gabarit, convient à Pearce qui envoie ses ingénieurs à Billancourt afin de développer son projet dit « M » sur la base de la 12. Cette berline franco-américaine doit débarquer sur marché brésilien dès 1968. Un an avant la R12 !
Seulement, en 1967, Kaiser, qui s’est associé à Willys-Overland en 1953, n’arrive plus à joindre les deux bouts, et commence à se séparer de ses activités automobiles. Ford rachète Willys-Overland do Brasil, qui possède une belle usine… et conserve le projet M. Conséquence, l’ovale bleu le lance à la date prévue, sous son propre badge. C’est ainsi que naquit la Ford Corcel, destrier en portugais.
Cette berline moyenne bénéficie du moteur Cléon Fonte de 1 289 cm3 adapté à l’essence locale. Après des soucis de fiabilité, dus à une mise au point précipitée, la Corcel rencontre le succès, se déclinant en 4 portes, puis en break 3 portes et en coupé 2 portes. Il y aura même une variante GT à deux carbus développant 80 ch. Restylée en 1973, elle accueille une variante 1 372 cm3 du Cléon, et ressemble nettement à une mini pony-car américaine.
En 1977, la Corcel se voit entièrement redessinée dans un look très Ford Europe mais conserve sa base de R12, même si le moteur est porté à 1,5 l. Diverses carrosseries s’ajoutent à la gamme, dont un pick-up, sans oublier une variante plus chic Del Rey. Modernisée en 1985, la Corcel durera jusqu’en 1991 sous l’appellation Del Rey. Bien plus longtemps que la R12 et ses dérivées en France !