Récidive d’alcool au volant, plus d’interdiction totale de conduite après l’annulation du permis de conduire mais un éthylotest anti-démarrage électronique

 

Cass. Crim., 12 octobre 2021 n°21-80370

 

C’est un arrêt fort intéressant qui a été rendu le 12 octobre 2021 par la chambre criminelle de la Cour de cassation qui vient lever de nombreux doutes quant au nouveau dispositif applicable en matière de récidive d’alcool au volant introduit par la loi LOM du 24 décembre 2019.

 

Par Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en Droit

Président de la Commission ouverte Droit routier du Barreau de Paris

Directeur scientifique des États Généraux du Droit Automobile

 

Le premier ministre de l’époque, Édouard Philippe l’avait annoncé lors du comité interministériel de sécurité routière de janvier 2018 : l’éthylotest antidémarrage électronique, l’EAD allait enfin être généralisé.

 

Ce dispositif qui doit être installé dans un véhicule par un centre agréé à cet effet, interdira le démarrage d’un véhicule en présence de la moindre quantité d’alcool dans l’organisme.

 

On peut, en effet, parler d’une absence d’alcool dans l’organisme puisque le taux autorisé par un dispositif EAD a été baissé à 0,10 mg par litre d’air expiré. En pratique, ce taux qui s’applique notamment aussi aux conducteurs en période probatoire n’autorise même pas l’absorption d’un verre de vin.

 

Si cet anti-démarrage électronique avait déjà été fait l’objet de nombreux textes (et on pense notamment à la loi LOPPSI II du 14 mars 2011), il aura fallu en réalité une dizaine d’années pour que ce dispositif fasse son entrée dans la pratique quotidienne des juridictions correctionnelles.

 

Depuis quelques mois, l’EAD n’a plus rien de théorique, et l’on peut retrouver ce dispositif dans les véhicules de nombreux conducteurs condamnés pour des faits de conduite sous l’empire d’un état alcoolique et parfois même avant leur condamnation.

 

Il est, en effet, possible désormais pour un préfet d’autoriser la conduite d’un véhicule avec un EAD dans le cadre de la mesure provisoire de retrait de permis.

 

Si le choix de l’EAD relève du facultatif pour le préfet dans le cadre de la mesure provisoire préfectorale, ce dispositif a été rendu obligatoire en cas de condamnation pour des faits d’alcool en commis en état de récidive légale.

 

La loi d’orientation des mobilités n° 2019-1428 dite LOM du 24 décembre 2019 est venue, en effet, retoucher les dispositions de l’article L234–13 du Code de la route. Auparavant, ces dispositions prévoyaient la constatation de plein droit de l’annulation du permis de conduire, peine que le juge pouvait à sortir d’une période d’interdiction plus ou moins long de solliciter la délivrance d’un nouveau titre.

 

L’article L234–13 du Code de la route précise désormais : « toute condamnation pour l’une des infractions prévues aux articles L. 234-1 et L. 234-8, commise en état de récidive au sens de l’article 132-10 du code pénal, donne lieu de plein droit à l’annulation du permis de conduire avec interdiction de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé par un professionnel agréé ou par construction d’un dispositif homologué d’anti-démarrage par éthylotest électronique pendant une durée de trois ans au plus, applicable à compter de la date d’obtention d’un nouveau permis de conduire ; cette interdiction ne s’applique cependant pas si ce nouveau permis a été obtenu plus de trois ans après l’annulation du précédent. A l’issue de cette période d’interdiction, l’intéressé est soumis à un contrôle médical de l’aptitude à la conduite. »

 

La chambre criminelle de la Cour de cassation vient dans cet arrêt du 12 octobre 2021 mettre fin à certaines interrogations qui entouraient l’application des dispositions nouvelles de l’article L234–13.

 

Dans cet arrêt (qui est le premier avoir été rendu sur l’application de ces dispositions depuis le remodelage par la loi d’orientation des mobilités), la Cour de cassation précise que ces nouvelles dispositions s’appliquent immédiatement y compris aux infractions commises avant l’entrée en vigueur de la loi d’orientation des mobilités.

 

Dans cette espèce, les faits de conduite sous l’empire d’un état alcoolique avaient bien été commis avant, et la Cour de cassation justifie cette application par une nouvelle modalité de la peine d’annulation du titre aboutissant dans les faits à une sanction moins sévère pour le conducteur.

 

Et effectivement la possibilité pour le conducteur de pouvoir retrouver immédiatement la possibilité de conduire certes avec un EAD constitue bien évidemment pour lui une sanction moins sévère qu’une annulation sans possibilité aucune de conduire.

 

Mais au-delà de la question de l’application dans le temps de la nouvelle loi plus douce, la chambre criminelle vient mettre fin à une interrogation quant à la possibilité pour un tribunal de prononcer à la fois une annulation du permis de conduire, une période d’interdiction de solliciter un nouveau titre et ensuite une période de conduite sous EAD.

 

À aucun moment la Cour de cassation ne semble envisager cette possibilité et ne laisse place à aucun doute quant à l’application systématique de l’EAD après une annulation qui ne peut plus être assortie d’une période d’interdiction de solliciter un nouveau titre.

 

 

2021 le Dall Avocat Permis de conduire – Droit automobile

 

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Image par Steve Buissinne de Pixabay



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